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          La première pierre de l'usine électrique du barrage Bertrand fut posée par Monsieur CHERON, Ministre de l'Agriculture, le 10 Avril 1922. Il fut favorablement impressionné par l'importance de l'œuvre, il accorda sur les fonds de son ministère une subvention de 400 000 francs. L'Office National du Crédit Agricole fut sollicité. Il ne fit pas la sourde oreille et s'engagea à prêter à la coopérative la somme de 900 000 francs à 2 % remboursable sur 20 ans.

 

 

 

          Monsieur BROULHIET, propriétaire de l'usine de Laroque, contribuera pour une large part à cet ouvrage, toutes les études hydrauliques et tous les projets ont été élaborés par ses soins. L'achèvement complet des travaux et la mise en marche industrielle de l'usine se réalise en Mars 1924.

 

          L'estimation du projet au départ s'élève à 2 300 000 francs, 1 665 souscripteurs apporteront un capital social de 1 808 000 francs. La longueur totale des lignes constituant le réseau en 1925 est de 208 kilomètres desservant le territoire de 45 communes. Cazilhac a été le dernier village à adhérer à la coopérative (à cette date).

 

 

 

Activités du Village au 20ème siècle


Vie sociale - Divertissement

 

          En ce début de siècle, les loisirs au village étaient bien modestes en dehors des pratiques religieuses qui mobilisaient la quasi-totalité de la population, les jours de fête et le Dimanche, pour les deux cultes mais plus particulièrement, chez les Catholiques avec les pratiques d'office, messe du matin, grand messe, vêpres, processions afférentes aux fêtes de l'Eglise.

 

          Il ne restait plus beaucoup de temps disponible pour la détente. Les hommes en grand nombre à la sortie des Offices se dirigeaient au Café Paul Richet pour jouer aux cartes, à cette occasion ils buvaient : une suze, un quinquina, très peu d'absinthe. L'après-midi on jouait aux boules cloutées, au jeu de quilles.

 

          Par la suite quelques kermesses paroissiales, avec la venue de conteurs d'histoires ou chanteurs amateurs qui se produisaient sur une scène, apportaient un peu d'agrément à cette routine dominicale.

 

          Il y avait la "Baoüte", Fête Votive que l'on attendait avec impatience d'une année à l'autre, les musiciens avec leurs instruments d'époque pipeau, flageolet, hautbois, accordéon" animaient la place publique et faisaient danser très sagement filles et garçons, sous le regard très vigilant de papa et maman, assis sur une chaise, surveillant leur progéniture féminine.

 

          Dès que le premier coup de minuit sonnait à l'horloge, un regard, un geste, donnait l'ordre immédiat de rentrer à la maison. La bataille de confettis procurait une petite occasion de se rapprocher ou de s'éclipser quelques minutes, pour un petit "flirt" seulement.

 

          Il régnait cependant une ambiance presque fraternelle entre gens du même hameau et en particulier entre voisins, on se rendait service, on se portait secours mutuellement.

 

          Tout était bon pour se réjouir, bien sûr il n'y avait pas de radio, au début du siècle pas encore l'électricité, on s'éclairait au "Lun a queto" (lampe à huile), à la lampe à pétrole, ou à la bougie. Mais les géantes cheminées permettaient l'éclairage, nécessaire au petit groupe installé en arc de cercle devant son foyer, pour passer de bonnes soirées d'hiver. Les femmes cousaient, tricotaient, crochetaient, les hommes réparaient quelques outils, bricolaient. Les grands-parents racontaient des histoires ou prodiguaient leurs conseils aux plus jeunes.

 

          On saisissait toutes les opportunités. Pendant la longue saison des châtaignes (Octobre à Janvier), on faisait la "brasucade", on dégustait tantôt le vin nouveau ou la "piquette" (vin de pressoir), tantôt chez les uns tantôt chez les autres. Il en était de même pour les crêpes ou les "Bougnettes". Quelle est la famille qui ne "faisait" pas son cochon ? A nouveau on se réunissait, entre voisins, pour "coussir" la saucisse, ou farcir le saucisson. .On mangeait ensemble la "Roustide" et le boudin.

 

          L'été était une autre façon de fréquenter. Les gens "prenaient le frais" devant leur porte sur des bancs en pierre, en bois, les voisins apportaient leurs chaises ou leurs petits bancs, sur la place publique du quartier et bavardaient de tout et de rien jusqu'à 10 ou 11heures du soir, car le lever s'effectuait très tôt le matin.

 

          Il arrivait quelques fois que les jeunes adolescents troublent le sommeil des habitants, en pratiquant "le martelet". Cailloux attachés à une longue ficelle que l'on suspendait aux poignées de portes d'entrée et que l'on actionnait à l'autre extrémité, à bonne distance, afin de ne pas recevoir une casserole d'eau ou bien souvent le contenu du vase de nuit. Tout cela pour se divertir le plus convenablement possible...

 

          Le vol des fruits, même minime, était puni d'amende (Garde-Fruits, Garde-Champêtre). Donc la nuit était propice à l'arrogance et allègrement la jeunesse allait "frotter un pénéquier" se faire un cerisier. Il y en avait partout à ce moment là, de même pour les pêchers, poiriers et autres fruitiers. Tout cela sans aucun profit, histoire de plaisanter simplement.

 

          Il y avait aussi "le charivari" qui se pratiquait lorsqu'un veuf ou une veuve se remariait. La coutume était qu'ils devaient donner quelques pièces de monnaie à la jeunesse de leur quartier, pour qu'ils puissent eux aussi festoyer à leur façon. Si les futurs époux refusaient de donner ces pièces, alors était décrété "le charivari", on confectionnait deux mannequins bourrés de paille très ressemblant aux personnes. Le jour du mariage, on brûlait ces paillasses, on confectionnait à l'aide de corde et de ficelle une longue traîne ou étaient attachés vieilles casseroles, couvercles, roues de bicyclettes, etc, que la jeunesse tirait en zigzaguant devant les futurs époux se rendant à la Mairie. Les refus étaient pratiquement rares, car cela faisait un tel bruit et une telle poussière sur les routes encore non goudronnées, que le choix entre le refus ou le don de la monnaie était vite fait.

 

          La jeunesse de 20 ans avait aussi quelques pratiques de passe-temps. Il arrivait qu'elle fasse quelques farces aux charretiers, aux transporteurs qui n'appréciaient pas toujours. La nuit avancée, ils déplaçaient à plusieurs dizaines de mètres, quelques fois 200 mètres, les charrettes ou les tombereaux que leurs propriétaires avaient laissés devant leur maison. Ces hommes se levaient très tôt le matin, encore à la nuit et l'on comprend leur colère, à la désagréable surprise de ne plus voir leurs véhicules hippomobiles à l'endroit laissé la veille et ne sachant nullement où ils avaient été entreposés. Contraints d'attendre le lever du jour pour les récupérer.

 

          Après la guerre de 14/18, on voit un nombre important de demandes de soutien de famille affluer au Secrétariat de la Mairie. Beaucoup de familles sont en difficulté.

 

          On va instaurer des taxes diverses, notamment sur les jeux qui amèneront dans les caisses 6 000 francs.

          - Une taxe sur les colporteurs de 50 centimes, si le colportage est pratiqué à dos d'homme, 1 franc s'il est pratiqué en voiture.

          - Un droit de place dans les rues et places publiques pour chaque mètre carré occupé. Etalage, Baraques, Charrettes (pas encore d'automobiles) payent 50 centimes par mètre carré et par jour.

 

          Ce droit de place et de stationnement est géré par le garde champêtre qui en assure l'encaissement.

 

          En 1920 on vend les fours communaux dont on ne se sert plus depuis quelques années. Celui de Cazilhac-le-Haut est enlevé par adjudication à Monsieur Blondiaux pour la somme de 500 francs. Celui de Cazilhac-le-Bas, à Monsieur Henri SERRE, de la CADIERE pour 1 600 francs (en 1932).

 

          Le 21 Octobre 1921, on dénombre 125 déclarations de vin. Le Préfet attribue au secrétariat de la mairie un bureau de régie. Les voitures automobiles viennent depuis peu de faire leur apparition, elles sont taxées de 15 francs. Les cars, motocyclettes et vélos 5 francs.

 

          Ce 12 Août 1926, le Conseil vote la somme de 4 500 francs pour l'achat d'un corbillard à traction animale, Monsieur BASCOU carrossier à Nîmes en est le fournisseur. Pourquoi cet achat...? Jusqu'à cette date, le transport du cercueil se faisait avec un brancard transporté à dos d'homme, et, vu la dispersion de la commune et le lieu excentré du cimetière, ce transport était pénible. Mais la principale raison en a été.., que le brancard était devenu hors d'usage. L'année suivante, Marius RAUZIER, construit le hangar pour loger ce véhicule ; le montant des travaux s'élève à 3 479 francs.

 

          Le 17 Juillet 1933, l'Administrateur des P.T.T, souhaite l'installation d'un local pour le téléphone public et précise "bien convenable". La rémunération du gérant sera faite par la Mairie. Par mesure d'économie, le Conseil décide que le gérant devra accepter cette installation à son domicile. Il devra distribuer les messages dans les hameaux ainsi que les appels. Son traitement pour ses services de gérance et de distribution sera de 1 050 francs l'an pour la première estimation.

 

          Suite à la prime donnée aux oléiculteurs on constate beaucoup de "tricheries" aux déclarations. La Mairie établit une sévère vérification aux déclarants.

 

          En 1937, la journée du travail de 8 heures est établie, il est constitué une commission communale pour vérifier les abus, 48 heures par semaine obligatoire.

 

          Un arrêté municipal stipule que les salariés occasionnels employés sur la commune pour la journée de 8 heures de travail percevront 22 francs + 1 franc par enfant à charge. Les chômeurs occupés par la Mairie 19 francs + 1 franc par enfant à charge. Elle fixe le prix du transport par charrettes ou tombereaux, toujours pour 8 heures, à 55 francs l'attelage à un collier.

 

          Comparons ces prix avec le traitement des employés municipaux :

         

          -Secrétaire de Mairie 1 000 francs par mois

         

           -Garde champêtre 700 francs par mois
          

           -Gérant du téléphone 182 francs par mois

 

          

          Le budget à cette date est de 57 350 francs. (A titre comparatif, la 5 CV d'André CITROËN se vend à 10 000 francs). Toujours la même année, on remet à neuf le clocher de l'Eglise devenu menaçant.

Deuxième Guerre Mondiale

 

          Samedi 2 Septembre 1939 est décrétée la mobilisation générale. Cazilhac voit partir ses enfants à la guerre. Certains ne reviendront pas au pays, d'autres reviendront après la libération et auront passé six années comme prisonnier de guerre, dans les camps au travail forcé.

 

          En 1940 est crée le "Chantier de Jeunesse" service obligatoire pour les jeunes appelés. Notre village accueille ses compatriotes alsaciens et lorrains, une compagnie de soldats belges sur la place publique, et un grand nombre de citadins venus chercher un certain refuge en campagne.

 

          1941 : Mise en place des cartes alimentaires, il va être créé à cette occasion un emploi supplémentaire à la Mairie, pour la distribution de ces cartes. Est nommé à cet emploi Madame CATTU, elle percevra un traitement annuel de 1 800 Francs et, deux ans plus tard, par un accroissement de travail 6 200 Francs.

 

          Le Conseil décide, afin d'assurer un bon ravitaillement en viande et d'en contrôler le débit, de n'autoriser qu'André CAZALET à fournir en exclusivité la commune. La base de notre alimentation était le gruau, les lentilles sauvages appelées "vesces", le rutabaga, le topinambour, tout ce que ne voulait pas l'occupant. L'orge grillée, dans chaque quartier, toutes les semaines, après infiltration, devenait une boisson chaude qui prenait non pas le goût mais uniquement la couleur du café.

 

 

 

          Une réduction de l'éclairage public est imposée par la préfecture. Vingt-deux lampes sont autorisées pour tout le village avec extinction obligatoire à 22 heures. Le camouflage des lampes extérieures privées, les vitres des ateliers ou usines devront être teintées en bleu impérativement.

 

          En 1942, l'occupant décrète l'institution de la relève, c'est-à-dire : pour trois ouvriers français partant volontairement travailler en Allemagne, un prisonnier français retournera dans son foyer. Un ou deux exemples à Cazilhac. C'est l'expatriation des jeunes S.T.O. Service Travail Obligatoire en Allemagne dont deux ne reviendront pas : Emile FOULQUIER, Jacques FAVEL mort au camp de Kommando Zwieberge de Buchenwald.

 

          Quelques jeunes, pour échapper au S.T.O., rejoignent le maquis, d'autres moins jeunes aussi. Ils sont appelés terroristes par l'occupant et les collaborateurs français. C'est seulement en 1943 qu'est formé le maquis Aigoual-Cévennes.

 

          Le 30 janvier de cette même année est crée, par LAVAL, la milice qui recrute ses hommes parmi les pires éléments de la population. Ses exactions et ses crimes sont nombreux. Il serait faux de dire que Cazilhac a connu les atrocités barbares de ces hommes "habillés en noir". Mais chacun savait que d'être arrêté par ces monstres était terrifiant. Tout de même, une grande suspicion régnait dans la population... divisant le village par des opinions divergentes. Cela se passait, il y a tout juste cinquante ans.

 

          Le 19 Juillet 1944, un détachement allemand situé sur la route du Vigan mitraille sur la route de l'Aqueduc (Route de St-Laurent) une camionnette ramenant des ouvriers de leur travail. Un des ouvriers, Henri AGRANIER est assassiné lors de cette fusillade.

L'occupant avait créé la pénurie des denrées alimentaires et celles de première nécessité. Celles-ci furent rationnées à l'aide de cartes délivrées par la Mairie ; elles donnaient droit à divers tickets, pour obtenir du pain, de la viande et des matières grasses (huile et beurre).

 

Un exemple de ces catégories de cartes :

 

 

E.

Nourrisson jusqu'à 3 ans.

J. l

Jeunes de 3 à 6 ans.

J.2

Jeunes de 6 à 13 ans.

J.3

Jeunes de 13 à 18 ans

A

Adulte.

T

Travailleur pénible.

T1

Travailleur extra pénible.

V

Vieillard.

 

 

          Les tickets donnaient droit à un quart de lait par jour aux E, Jl, J2 : 125 grammes de chocolats et 250 grammes de riz par mois. Toutes les catégories sauf les E avaient droit à 250 à 300 grammes de pain par jour (seigle ou maïs bien souvent) ; 150 grammes de beurre ou 100 grammes d'huile et un demi-kilo de sucre par mois. Les gros fumeurs étaient affligés, ils devaient se contenter de 80 cigarettes ou l'équivalent de deux paquets de tabacs par mois ; les femmes : demi-ration. Les fruits étaient réservés en priorité aux Jl, J2 et J3.

 

          Fort heureusement, le village étant producteur de légumes frais, nous n'avons pas connu ce rationnement. Mais la distribution en restait réglementée, seule une distribution contingentée de pommes de terre avait lieu selon l'apport, deux ou trois fois par mois.

 

          Les détaillants(commerçants) récupéraient les tickets des consommateurs qu'ils devaient coller sur des fiches, les remettaient ensuite à leurs grossistes qui, en échange équivalent (5 à 10%), leur délivraient les denrées ou marchandises. La Mairie délivre également des bons d'achat, mais avec parcimonie et rarement distribués à bon escient... Avec ces bons, on pouvait se procurer des chaussures, des vêtements, des pneus de vélos, de l'essence mais uniquement pour les véhicules de premier secours.

 

          Pratiquement tous les véhicules automobiles, voitures, camionnettes étaient équipés de "gazogène". C'était une espèce de marmite géante placée sur le côté ou à l'arrière du véhicule, alimentée par du bois ou du charbon de bois, qui par un système de filtrage fournissait un gaz substitutif à l'essence mais en qualité inférieure. Peu importe, "restriction oblige".

 

          Un marché très important de vente de cartes et de bons de tickets à prix illicites se développe rapidement en même temps que l'instauration de ce rationnement. C'est l'époque du marché noir ou du troc. Les deux pénalisent les plus démunis. Se procurer des denrées au marché noir aux prix exorbitants, est impossible, et faire échange avec quoi ? Quand on ne possède rien, rien n'est possible non plus.

 

          Ce marché noir a été exploité à outrance par certaines gens, dépourvus de scrupule, qui en ont tiré de grands profits. Ce marché était proscrit par la loi, ce qui donnait autorisation légale à la maréchaussée de saisir même les faibles quantités, un kilo de châtaignes, un kilo de pommes de terre, farines [acquises soi-disant illégalement (sic)],- mais qui n'étaient pas perdues pour tout le monde.

 

 

 

 

          Par contre, les condamnations "pleuvent" pour les petits "délinquants" à consommation familiale. C'est ainsi que sont condamnés par le tribunal du Vigan trois habitants de Cazilhac, pour le délit suivant : 50 kilos de pommes de terre pour l'un, un agneau et un cochon achetés sans autorisation, 200 Francs d'amende pour chacun d'eux et confiscation du produit évidemment.

 

          Ce même tribunal (compte-rendu du journal "Le petit Méridional" du 27 juin 1942) nous informe sur d'autres condamnations prononcées chez nos voisins. Est condamné un habitant pour l'achat de plusieurs paires de galoches (sans bon d'achat légal) à 500 francs d'amende et à la même somme pour non-déclaration d'élevage de cochon... seul le gibier et la volaille étaient dispensés de déclaration, en petit nombre bien sûr. Ce rationnement forcé, avec son marché parallèle, va s'atténuer progressivement après la libération pour se terminer définitivement en 1946.

 

 

 

Occupation de Cazilhac

 

 

 

          Ce 24 Août 1944 - Bataille de Ganges. Longue journée d'angoisse.

 

          Notre village en a été le théâtre opérationnel. L'occupant après avoir été arrêté à l'entrée de Ganges, y a séjourné de six heures du matin à seize heures de l'après-midi, d'où il s'est replié.

 

...



04/06/2008
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